DISPARITION - L’homme qui a signé plus de 140 pièces, interprétées par une centaine de compagnies au monde - mais rarement en France -, est mort mercredi.
Passer la publicité Passer la publicitéLe public avait rendez-vous avec lui au Théâtre des Champs-Élysées à la fin juin : le Dutch National Ballet vient y présenter un programme Van Manen. Chose rare en France. Si le chorégraphe néerlandais, mort le 17 décembre à l’âge de 93 ans, a effectué en Europe et aux États-Unis une carrière considérable, les frontières de la France lui sont restées peu ou prou fermées. Il aura donné Grosse Fugue à l’Opéra de Paris en 1986 et Trois Gnossiennes, sa pièce signature, à la demande d’Aurélie Dupont en 2019.
L’an dernier, il avait fait le voyage à Bordeaux pour transmettre Frank Bridge Variations au Ballet. C’est bien peu de pièces en regard de son œuvre gigantesque : le chorégraphe en avait signé plus de 140, interprétées par une centaine de compagnies au monde, de San Francisco à Saint-Pétersbourg. Sans doute la France lui a-t-elle préféré son successeur à la tête du Nederlands Dans Theater, Jiri Kylian, dont le travail, également fondé sur la musique, est plus contemporain et plus émotionnel. Chez Hans van Manen, il y a de la rigueur. C’est un Balanchine hollandais, qui travaille ses chorégraphies sur les partitions. Avec humour ou gravité mais toujours au cordeau. Il met des pointes aux pieds des filles mais il lui arrive de les troquer contre des talons aiguilles, par exemple pour Twilight.
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Un esthète disert
Né en 1932 à Amsterdam, il découvre la danse par les comédies musicales américaines et cherche à tout prix à mettre un pied dans un théâtre. Il débutera comme coiffeur maquilleur sa carrière de danseur dans la compagnie de Sonia Gaskell, Ballet Recital, en 1951 avant d’intégrer en 1952 l’Opéra d’Amsterdam. Il y crée sa première chorégraphie en 1955. Il veut voir autre chose : le voilà à Paris dans les ballets Roland Petit, une voie plus théâtrale que la sienne et qui n’est décidément pas la sienne. Il repart aux Pays-Bas pour danser au NDT à la Haye. Il y deviendra chorégraphe, puis directeur artistique (1961-1975).
Le Dutch National Ballet d’Amsterdam l’appellera comme chorégraphe résident (1973 à 1997) puis Kylian lui fera à son tour une place de chorégraphe résident au NDT (1988 -2003). Il y crée une quarantaine de ballets dont Symphonie en trois. Il reviendra ensuite à Amsterdam comme chorégraphe résident à partir de 2005. Ses muses se nomment Gérard Lemaître, Marian Sarstädt, Sabine Kupferberg, l’épouse de Jiri Kylian, ou Sol Léon qui dirigera à son tour le NDT avec Paul Lightfoot. Anthony Dowell, Marcia Haydée, Natalia Makarova, Rudolf Noureev, Ouliana Lopatkina ou Diana Vichneva interprètent aussi ses chorégraphies.
L’homme est élégant, affable, disert, amateur de bagues qu’il porte à tous les doigts. C’est aussi un esthète. À côté de la chorégraphie, il est photographe. Lorsqu’il crée, il sait exactement ce qu’il veut. Son œuvre considérable en nombre lui vaut le grief de faire de la chorégraphie au kilomètre. Un jugement qui semble exagéré. En France, les directeurs de compagnie en mal de chorégraphes travaillant sur pointes se tournent désormais vers son œuvre : après Bordeaux l’an dernier, il devrait être dansé au Capitole de Toulouse l’an prochain.

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