Faire pousser de la salade sur la Lune, produire de l’oxygène sur Mars et recycler l’eau et les déchets à des centaines de milliers de kilomètres de la Terre. L’idée peut sembler farfelue. Et pourtant, c’est désormais une priorité scientifique mondiale. Mercredi 26 novembre 2025, des chercheurs de onze pays ont dévoilé une feuille de route internationale dédiée à l’utilisation des plantes comme systèmes de survie pour les futures missions sur la Lune et sur Mars.
Parmi les plus de 40 scientifiques impliqués venus des États-Unis, du Japon ou encore d’Australie, seules trois chercheuses françaises ont participé à ce travail d’envergure. Et toutes travaillent à Clermont-Ferrand, à l’Université Clermont Auvergne. Une singularité qui place discrètement l’Auvergne au cœur de la conquête spatiale.
Elles aident à concevoir des systèmes de vie hors gravité
Les trois scientifiques – Valérie Legué, Mélanie Decourteix-Volle et Lucie Poulet – ont apporté leur expertise complémentaire depuis deux laboratoires clermontois : le laboratoire PIAF (« Physique et physiologie Intégratives de l’Arbre en environnement Fluctuant ») et l’Institut Pascal. Leur mission : aider à concevoir des systèmes de vie capables de fonctionner en environnement extrême, là où la gravité disparaît, où les ressources sont comptées et où chaque erreur peut être fatale.
Car dès 2027, avec la mission Artemis III de la Nasa, l’humanité retournera sur la Lune pour la première fois depuis 55 ans. Si les astronautes n’y passeront que quelques jours, les scientifiques planchent déjà sur l’après : des séjours longs, puis une installation humaine durable, d’abord lunaire, ensuite martienne.
« Cette feuille de route, c’est un document stratégique », explique Valérie Legué, enseignante-chercheuse au laboratoire PIAF de l’Université Clermont Auvergne. « On y dresse l’état des connaissances et surtout les verrous scientifiques à lever pour permettre la croissance des plantes dans l’espace. » Ses travaux portent sur un enjeu fondamental : la perception de la gravité par les plantes. « Comprendre comment une plante « se tient » est essentiel pour la cultiver en microgravité », résume-t-elle.
Des découvertes aussi utiles sur Terre
Lucie Poulet, chercheuse à l’Institut Pascal, se situe sur un versant plus appliqué. La scientifique travaille sur l’optimisation des systèmes de culture spatiaux dans le cadre du programme européen MELiSSA (en anglais : Micro-Ecological Life Support System Alternative), véritable référence mondiale en matière de systèmes de support de vie biorégénératifs. « L’objectif est de créer des boucles fermées : les bactéries recyclent les nutriments issus des déchets humains pour nourrir des plantes qui produisent nourriture, eau et oxygène », résume-t-elle.
Si la Lune et Mars servent de terrain d’expérimentation ultime, les retombées sont bien terrestres. « Ces recherches peuvent transformer notre manière de produire durablement sur Terre », assure Valérie Legué. Agriculture économe en ressources, recyclage poussé, résilience face aux stress environnementaux : ce qui fonctionne dans l’espace pourrait bien sauver nos cultures de demain.




