Tech. ByteDance, la société chinoise propriétaire du réseau social, s'est entendue avec trois investisseurs dont le groupe Oracle pour créer une co-entreprise américaine.
Publié le 19/12/2025 à 08:23

En quelques clics sur TikTok ou autre réseau social, on a accès à des boutiques en ligne de lames létales sans vérification d'âge, pour quelques dizaines d'euros
afp.com/Antonin UTZ
TikTok a signé l'accord permettant de créer une co-entreprise américaine exigée par la loi pour éviter son interdiction aux Etats-Unis, selon un mémo interne du patron du réseau social chinois consulté jeudi 18 décembre par l'AFP. Tiktok et son propriétaire, le groupe chinois ByteDance, ont signé cet accord avec trois investisseurs - le groupe Oracle du multimillardaire Larry Ellison, la société d'investissement Silver Lake et le fonds émirati MGX -, selon un mémo interne du directeur général dévoilé jeudi par des médias américains et consulté par l'AFP.
La question des données personnelles
Cette signature était attendue depuis septembre, quand Donald Trump avait annoncé l'obtention d'un accord après d'intenses tractations entre Washington et Pékin sur l'avenir du réseau social, très prisé de la jeunesse et objet de multiples controverses à travers le monde. Le président américain avait alors prorogé une nouvelle fois, jusqu'au 23 janvier 2026, l'application d'une loi votée lors du mandat de son prédécesseur démocrate Joe Biden. Celle-ci prévoyait l'interdiction de Tiktok en janvier 2025 si le réseau ne se conformait pas avant à cette restructuration.
Le texte, dans l'esprit des législateurs américains, a pour but d'empêcher les autorités chinoises de mettre la main sur des données personnelles d'utilisateurs de TikTok aux Etats-Unis ou d'influencer l'opinion publique via le puissant algorithme derrière le défilement des courtes vidéos. TikTok, qui revendique 170 millions d'utilisateurs aux Etats-Unis, a admis que des employés basés en Chine avaient eu accès à des données de certains d'entre eux, mais a assuré que rien n'avait été communiqué au gouvernement chinois.
Majoritairement détenue par des investisseurs américains
La future co-entreprise, nommée "TikTok USDS Joint Venture LLC", opérera comme une entité indépendante" de TikTok "avec autorité sur la protection des données" des utilisateurs américains, "la sécurité de l'algorithme, la modération du contenu" et la conformité du réseau social, selon le mémo adressé à ses employés par le directeur général de la société, Shou Chew.
Conformément à un décret signé en septembre par Donald Trump, "la coentreprise américaine sera détenue majoritairement par des investisseurs américains, gouvernée par un nouveau conseil d'administration de sept membres dont la majorité sera américaine, et soumise à des conditions qui protègent les données des Américains et la sécurité nationale des Etats-Unis", assure le patron.
Oracle, Silver Lake et MGX, réputés proches de l'administration Trump, détiendront, à parts égales, 45 % de la coentreprise. Des investisseurs actuels de ByteDance, dont plusieurs fonds américains, détiendront 30,1 % et ByteDance les 19,9 % restants. En revanche, TikTok conservera le contrôle aux Etats-Unis des services chargés de ses activités commerciales (publicité, vente en ligne, communication...) et de "l'interopérabilité mondiale" de l'application.
L'évolution ou non du contrôle de ByteDance sur ces activités de TikTok sur le sol américain n'est pas évoquée par le mémo. "Il y a encore du travail à accomplir au fur et à mesure que nous approchons de l'échéance du 22 janvier 2026", poursuit Shou Chew dans sa communication interne.
Accusations en Europe
De fait, la conformité de la structure sera scrutée de près. En septembre, le président de la commission aux Affaires chinoises de la Chambre des représentants, le républicain John Moolenaar, avait prévenu qu'il "(effectuerait) une revue complète" de l'accord, accusant ByteDance d'être "un acteur malveillant".
L'application, qui compte plus d'un milliard et demi d'utilisateurs, est dans le viseur de plusieurs autorités à travers le monde, accusée de cantonner ses utilisateurs dans des silos via un algorithme opaque, et de favoriser la désinformation et les contenus illégaux, violents ou obscènes.
En France, TikTok est visé depuis novembre par une enquête judiciaire, soupçonné de pousser les plus "vulnérables au suicide". Des manquements sur la protection des données, alimentant la crainte de communications aux autorités chinoises, lui ont valu une amende de 530 millions d'euros en Irlande, au nom de l'Union européenne, et une autre procédure est en cours. TikTok a fait aussi partie des plateformes accusées d'avoir été utilisées pour une "manipulation coordonnée" de l'élection présidentielle en Roumanie en décembre 2024, conduisant à l'annulation du premier scrutin.

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